En envisageant d’augmenter leurs taxes en ce moment, les responsables des écoles polytechniques opèrent une manœuvre potentiellement dangereuse
La demande des responsables des écoles polytechniques fédérales (EPF), d’augmenter les taxes d’études, ne manque pas de pertinence. En Suisse, les taxes se révèlent dans l’ensemble particulièrement basses. Puisqu’une grosse moitié des étudiants des universités et EPF provient de milieux a priori nantis, il n’est pas injuste d’exiger un peu plus.
Pourtant, même si elle relève d’une manœuvre tactique, la doléance exprimée ces jours par le Conseil des EPF et par Patrick Aebischer semble vénéneuse.
D’abord parce qu’au nom d’une mesure de rétorsion, elle affole les milieux académiques au mauvais moment. Le Conseil fédéral veut réduire les budgets dès l’année prochaine? Les EPF mettent les pieds au mur. Cependant, en ce moment, le paysage académique est dans le brouillard. Les grandes intentions du gouvernement pour la formation et la recherche seront présentées dans un mois. Nul ne sait exactement ce que la Confédération prépare.
Le Conseil fédéral crée la cacophonie, les EPF en rajoutent avec leurs piaillements pécuniaires.
Dans cette polémique, tout se mélange, potentiellement pour le pire. Une hausse des taxes fait sens, si elle permet de mettre enfin des moyens décents pour les bourses d’études. Le scénario légitime consiste à affecter les recettes nouvelles aux bourses, pas aux caisses générales des écoles. Le président de l’EPFL s’empresse d’ailleurs d’ajouter que si les prix augmentent comme il souhaite, il faudra améliorer les soutiens aux études. Là aussi, il y a sans doute une part de calcul: une augmentation des taxes provoquerait le sursaut attendu depuis des années en matière de bourses. Même si les cantons font quelques efforts d’harmonisation, le système des bourses d’études en Suisse est aussi radin qu’inégal.
Toutefois, croire qu’une hausse des prix provoquerait le nécessaire électrochoc pour les bourses exprime une certaine naïveté dans le machiavélisme. Il n’existe aucun signe laissant penser que les cantons sont prêts à aller plus loin dans l’aide aux études.
Dès lors, le pays risque de se trouver avec des EPF qui font bondir leurs taxes dans leur coin, sans que rien ne change à la pingrerie générale dont souffrent les étudiants de milieux défavorisés. C’est le pire des scénarios.
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